les noces du Ciel et de la Terre: 4ème partie

poème de Vahé Zartarian

 


 

 

C'est un souffle, un murmure, pas tout à fait un chant,
Qui s'envole en volutes ondoyantes.
Les voix s'accordent en se répondant.
Venus des profondeurs,
        des sons bien plus puissants se mettent à vibrer.
Sons dans des sons dans des sons,
         qui forment des entrelacs tourbillonnants,
         font naître au-dedans des visions colorées,
         et animent l'eau des corps d'une même pulsation.

Deux esprits apaisés ouverts l'un à l'autre,
Deux esprits libérés qui échangent leur corps.
Se voir par d'autres yeux et s'aimer plus encore,
Rire de ces audaces puisque tout n'est que jeu,
Célébrer le miracle qui crée cette matière.
Deux regards, une sensation,
Deux esprit, une intention.

Au rythme de la Terre qui se met à vibrer,
Chacun oscille entre forme de femme et forme d'homme.
Certaines maladresses déclenchent des fous rires;
Certains éloignements plongent dans des abîmes;
Certains rapprochements invitent au respect.
Quand la Terre cesse son chant,
Ils sont devenus doublement amants:
Déesse au corps de femme unie au dieu au corps d'homme,
Déesse au même corps d'homme unie au dieu au corps de femme.

Plus vite, plus fort, plus profond,
         le cosmos impulse un nouveau rythme.
Les eaux des corps vibrent à l'unisson
         et fusionnent au rythme de la même pulsation.
Une seule bulle d'eau,
         où la vague se propage,
         rebondit d'un bout à l'autre et s'amplifie.
Vague de caresses,
Qui soulève les âmes au-delà de plaisirs connus.
Première extase,
Où dieu et déesse partagent les secrets de leur intimité.

Deux esprits dans un corps,
Et la vague de caresses qui monte et monte encore.
Le son devient lumière,
         devient chaleur,
         devient extase.
Embrasement.

Un éclair aveuglant les frappe de stupeur.
Puis, rien...
Rien d'autre que l'évidence d'une conscience consciente.
Flottement...
L'éblouissement s'estompe,
Alors l'autre évidence:
La conscience consciente d'une autre conscience consciente.
Cela n'a pas de forme, pas de contenu, pas de visage;
Cela n'a pas de mémoire, pas d'histoire.
C'est juste ici présent, comme une indicible évidence.
Miraculeux instant de pure création
         où la conscience se réinvente.
Voici Un qui s'est scindé pour n'être pas tout à fait Deux;
Voilà Deux qui ne sont plus séparés sans être tout à fait Un.
Ce n'est pas Nous, ce n'est pas Je,
C'est le nouveau souffle de l'esprit qui habite en nous-je.

 

illustration d'après Zao Wou Ki: 10.3.76


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